Savoir conduire un entretien d’évaluation efficace.
Source : Les Echos
La fin d’année approche, et avec elle, le rituel immuable de l’entretien annuel, que chaque entreprise nomme à son gré « d’évaluation », « de progrès », « de performance », etc. L’exercice est connu, il s’agit de faire le bilan de l’année au regard des objectifs fixés un an auparavant, et d’en fixer de nouveaux pour l’année à venir. Dans la plupart des cas, la rémunération variable est corrélée à cette appréciation. Ce moment, sorte de concentré managérial, est déterminant en ce qui concerne la relation que l’on tisse avec son collaborateur.
Deux ressorts sont essentiels pour créer un climat de confiance durable : accorder autant d’importance au « comment » qu’au « combien » et tenir compte des difficultés rencontrées.
Récemment, lors d’un séminaire, un manager racontait que son chef direct lui avait assuré que sa qualité principale était qu’il ne lui remontait jamais de problèmes. Il n’est probablement pas le seul qui considère qu’un bon collaborateur est celui qui le dérange le moins avec ses soucis. Il suffit au manager de vérifier que les objectifs sont atteints et de le gratifier d’une tape dans le dos, voire éventuellement d’une prime. L’entretien annuel est expédié, et le manager peut se remettre au « vrai » travail.
Une porte étroite
A l’inverse, certains collaborateurs qui n’ont pas atteint leurs résultats sont considérés comme contre-performants et, pis encore, comme de mauvaise foi, s’ils évoquent les problèmes qu’ils ont rencontrés. L’entretien dure, l’émotion monte des deux côtés. Et, la plupart du temps, chacun des deux protagonistes en sort avec le sentiment que l’autre ne le comprend pas, ce qui engendre comme corollaire une méfiance mutuelle.
Dans les deux cas, le manager n’est pas dans son rôle. Ou plutôt, il limite son rôle au strict minimum de distributeur-contrôleur d’objectifs. Tout l’enjeu pour les collaborateurs est alors de présenter la mariée la plus belle possible au risque de dissimuler. La conséquence est connue, à force de n’avoir que de bonnes nouvelles, on passe à côté de l’essentiel. C’est comme cela que des managers découvrent très tard des retards, comme c’est arrivé à Airbus, qui a dû reporter de plusieurs mois la livraison de son très gros porteur.
Entre l’attitude qui consiste à « faire à la place de » et celle qui consiste à ne pas vouloir savoir, la porte est étroite. Comme souvent en fonction de ses affinités et de son tempérament, le manager est tenté de basculer d’un côté ou de l’autre.
L’entretien annuel est l’occasion de refixer le cadre qui permet d’expliciter à nouveau l’une des spécificités de sa valeur ajoutée managériale : apporter une aide sur des difficultés de mise en oeuvre. C’est aussi le moment de se redonner un cadre de fonctionnement relationnel pour améliorer les échanges et limiter les interprétations.
L’un et l’autre pourront alors avoir en tête un critère commun de cette qualité relationnelle. Si le collaborateur ne remonte jamais rien de ses difficultés, c’est soit qu’il dissimule, soit qu’il est dans des tâches de pure répétition. Si le collaborateur remonte trop de sujets, c’est qu’il utilise son manager pour faire à sa place.
Eric Albert